Résumé : Le commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss, et sa femme Hedwig s’efforcent de construire une vie de rêve pour leur famille dans une maison avec jardin à côté du camp.
Avis : La Zone d’intérêt est un fracassant contre-pied à tous les films déjà vus sur la Shoah.
Avec une saisissante maîtrise du cadre, des décors et des lumières, Jonathan Glazer vient nous pétrifier à notre siège pendant 107 minutes. On est propulsé dans un film qui n’en est pas un, un quotidien lambda de la famille d’un haut gradé SS. On est spectateurs de leur vie. Aucune saillie visuelle, aucun élément narratif qui va venir secouer le quotidien de cette famille. Rien de spécial si ce n’est la bile abjecte et douloureuse de la Shoah. Les tirs incessants, les hurlements, les bruits des fours crématoires, l’arrivée des locomotives de déportation… Tout le fond sonore vient rythmer le macabre spectacle que nous offre le film. Mais nous ne verrons jamais la réalité en face, le cinéaste Anglais préférant l’impact horrible du son. Choix déjà emprunté pour le film sur la tuerie d’Utoya qui demeure profondément efficace.
Les interprètes centraux incarnent aussi magnifiquement bien la révulsion que nous procure les êtres humains de cette époque : la moquerie, l’aspiration à une belle vie, la déconsidération des Juifs et des gens pas comme nous mais aussi l’adulation des grandes figures Allemandes cruelles et magnanimes.
Glazer n’hésite pas à jouer avec son montage, histoire de nous placer encore plus dans l’inconfort. Ecrans noirs longuets, écrans rouge sang, gros plans déstabilisants avec accentuation du fond sonore, rupture de tonalités assez enivrantes… On ne peut qu’assister béats à cette leçon de cinéma grandeur nature. Seul bémol de taille : Un ventre mou au milieu de film peut plonger ceux qui décrochent dans un ennui dommageable.
Pourtant, même si nous n’avons pas accroché de bout en bout tant La Zone d’intérêt vous demande de maintenir une attention non-stop, Jonathan Glazer signe ici un très grand film qui mérite amplement sa palme d’or.