Le dernier opus en date de la saga mythique du space opera divise déjà les spectateurs.
Du lapidaire « j’ai détesté » au tout aussi bref « j’ai adoré », l’avis général semble tranché et repose sur un manichéisme trivial étrangement proche de celui des films. Pourtant le travail de Rian Johnson est loin d’être mauvais et vaut largement le détour par rapport au « réveil de la force » en s’efforçant de se détacher de l’aspect binaire du bien contre le mal. Le pari est réussi, non sans fausses notes, dans un mélange pas toujours homogène, mais cohérent avec le reste de la saga. Deux visions de l’univers semblent se superposer pour réussir à toucher le plus large public possible, du fan hardcore au néophyte en passant par, Disney oblige, la famille. C’est là le plus gros défaut du film, à vouloir plaire à tout le monde on finit par se mélanger les pinceaux dans un film sans rythme bien défini qui passe d’une séquence épique à un gag de désamorçage dramatique sans laisser le temps au spectateur d’apprécier les moments de grâce. Car de l’épique il y’en a, de la noirceur et du drame aussi, mais le tout est parasité par la touche Disney très présente.
Le gros point fort du film est l’utilisation de la Force. Bien que ce soit au détriment de duels aux sabres laser dantesques. La Force est ici l’élément clé qui maintient l’équilibre du récit. Donnant au passage à Luke Skywalker une tout autre stature qui va du parjure à la légende Jedi dans un cheminement scénaristique autrement plus intéressant que l’apprentissage de Rey, banal et expéditif. La lutte constante opposant les deux côtés de la Force s’atténue pour dévoiler une Force plus subtile qui montre bien que tout n’est pas blanc ou noir, comme devrait l’être le ressenti du film.
Le cast assure à tous les niveaux, et si l’on retrouve avec plaisir les personnages des précédents films, les nouveaux venus ne marqueront pas les esprits outre mesure. Sans parler du suprême Leader Snoke, qui après une première apparition réussie, verra son personnage bâclé sur tous les points. Kylo Ren gagne également en profondeur, grâce à l’évolution du personnage et l’interprétation intense d’Adam Driver, bien qu’on aurait préféré le voir casqué plus longtemps.
La réalisation, hors du cadre « classique » des Star Wars, apporte un dynamisme bienvenu à certaines séquences, comme l’affrontement contre la garde prétorienne d’élite de Snoke ou le finish move de la vice-amirale Holdo, incarnée par Laura Dern, qui est tout simplement anthologique, sur le plan visuel et sonore. À l’inverse, certains passages auraient mérité d’être raccourcis de moitié tant ils nous sortent du film et n’apportent rien de concret à l’histoire. La poursuite dans le casino en est l’exemple le plus criant.
Sans entrer plus loin dans les détails, Les derniers Jedi apporte autant de joies que de déceptions dans un film qui parait par moment interminable. Le foisonnement de détails, de plans, de personnages en fait un ensemble très dense autant dans le bon que dans le mauvais sens du terme. On en retiendra surtout l’exploitation du mythe et sa magie plus en profondeur, trop fréquemment parasité par la touche Disney. Cette nouvelle trilogie entend bien exploser les codes et les dogmes de ses prédécesseurs pour en établir de nouveaux tout en s’efforçant de respecter un univers déjà bien défini dans l’esprit des spectateurs. S’attaquer à la saga Star Wars tient aujourd’hui de la gageure et il est clair qu’il parait impossible de faire l’unanimité auprès des fans tant les attentes concernant l’ensemble de l’univers sont élevées. Reste à savoir si la nouveauté parviendra à convaincre les fans néophobes, totalement hermétiques à la nouvelle donne qui leur est proposée.
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