L’enjeu était pharaonique. Ce cinquième volet de la saga Pirates des Caraïbes était attendu comme le messie. Cinq ans après l’échec critique de la Fontaine de Jouvence, ce nouvel opus a été maintes fois repoussé (2015, 2016 puis 2017) et bénéficie d’un budget pharaonique de 320 millions de dollars. Mais que vaut-il réellement au final ?
Beaucoup de bruit pour pas grand-chose !
Le problème primaire de Pirates des Caraïbes 5 reste essentiellement le scénario. Devant autant de pauvreté narrative, on assiste littéralement à un film de transition. A la fin du film, nous sommes clairement dans la même situation qu’à la fin du film « Jusqu’au bout du monde » comme si la volonté des réalisateurs était de faire oublier le raté du quatrième volet. Rien n’a changé, les personnages n’ont pas connu une gradation conséquente et la seule « évolution » à souligner est celle de la famille Turner, dont on comprendra à la fin qu’elle sera un des piliers des prochains films de la saga. Le carcan dramatique autour de Salazar est un semi-échec. Joachim Rønning et Espen Sandberg réussissent à merveille les 30 premières minutes du film, offrant des introductions assez badass à Jack Sparrow et Salazar. Toutefois, l’histoire autour de ce grand méchant manque de rythme et d’impact. On ne bénéficie d’aucune scène iconique entre Sparrow et ce grand méchant, bien trop tiède pour être mis sur le même piédestal que Davy Jones.
Le film introduit un Sparrow en déclin, Capitaine ivrogne et moins charismatique que d’habitude, il partage le poids du film sur ses épaules avec l’arrivée de nouveaux protagonistes (Henry Turner et Carina Smyth) ce qui n’est pas forcément non plus une bonne chose. On a le sentiment d’assister à un recyclage des idées de la saga puisque La vengeance de Salazar se situe autour d’un axiome narratif INTRODUCTION – POURSUITE EN MER – SCENE FINALE des plus classiques, et n’arrive pas à introduire des enjeux nouveaux pour relancer une saga qui tourne en rond. La scène-post générique réserve une formidable surprise pour les fans de la saga mais n’est-elle pas aussi la sonnette d’alarme pour signaler la mort de la franchise à cause d’une reprise de tous les éléments principaux des trois premiers films ?
Côté visuel, le film assure le spectacle. Si nous n’avons pas de grosses scènes iconiques à l’épée, les plans de destructions sont en revanche, réussis et omniprésents. La scène d’introduction de Salazar (vue dans la bande-annonce) reste assurément la plus réussie du film par son visuel et son atmosphère anxiogène. LA VENGEANCE DE SALAZAR est un Blockbuster qui fait le taf proprement et intelligemment. La photographie est intelligente et change complètement le ton du film. Malgré tout, en terme de visuel, on reste largement en dessous de « Jusqu’au bout du monde », qui poussait moins loin le jusqu’au boutisme des CGI.
Au niveau des personnages, colossale déception. Si, comme nous l’avons souligné, Jack est en déclin, il n’en reste pas moins porté par un Johnny Depp en auto-dérision constante qui se confirme être le pivot central du long-métrage. Javier Bardem campe un antagoniste correct, par moments assez caricatural et Geoffrey Rush voit son Barbossa gagner plus d’épaisseur. C’est toujours un plaisir d’autant plus de retrouver des acteurs comme Kevin McNally (Gibbs), Martin Klebba (Marty), Keira Knightley (Elizabeth) ou encore Orlando Bloom (Will Turner) même si ce dernier disparaît pendant tout le film, alors qu’il aurait été logique que le Hollandais Volant vienne aussi combattre Salazar ! On a l’exemple typique des facilités de Disney, s’éviter certains surplus narratifs en faisant disparaître des zones essentielles de l’histoire.
Gros point faible : Kaya Scodelario et Brenton Thwaites. Impulser un nouvel élan à la saga en offrant des rôles majeurs à de jeunes acteurs est une bonne chose, mais les deux acteurs ne transforment pas l’essai. Scodelario manque cruellement de crédibilité dans son jeu niais et souvent mal inspiré tandis que Thwaites manque beaucoup de charisme. Nous avons imaginé des choix plus crédibles dans ces deux rôles (Taaron Edgerton et Alicia Vikander auraient, par exemple, été bien mieux).
Ainsi, PIRATES DES CARAIBES 5 est un volet inégal. Il manque cruellement d’impact narratif tant rien de nouveaux ne nous est proposé. Les personnages tiennent une fois de plus la cadence sans transcender leurs jeux d’acteur. Et les petits nouveaux sont une déception. Restez toutefois, pour les fans, jusqu’à la fin du générique.